Envie de s'indigner, de trépigner, de taper du poing et de hurler sa rage ! Marre du consensus mou, de la dictature du bio et des imprimés fleuris. On veut du dark, de l'oeil charbonneux, des gros godillots et des cheveux en pétard. Oui, le punk is back !
Et avec lui, toute la panoplie : piercings, vernis à ongle noir, piques et clous, épingles à nourrice et bracelets de force, sans oublier la crête, celle qu'on croyait à jamais remisée loin, très loin, des podiums.
Dans les défilés printemps-été 2011, on a vu apparaître d'étranges créatures en Perfecto déstructuré, jupes lacérées et crinières multicolores sur la tête. Même la chiquissime marque Burberry y est allée de sa veste à clous et accessoires très très piquants.
Côté musique, la mort de Malcom McLaren l'année dernière (enterré dans un cercueil tagué), manager iconique des Sex Pistols a remis le post-punk à l'honneur : cet été, les festivals font la part belle à The Flaming Lips, Joy Division, Nick Cave ou Johnny Rotten (ex-chanteur des Sex Pistols), sans oublier la sortie cette semaine d'un disque hommage consacré à Jacno, le père du punk français.
Même Bertrand Cantat s'y met, en prêtant sa voix à un morceau du dernier album du groupe électro-punk Shaka Ponk, basé à Berlin.
Ras-le-bol du zen
"Ces dernières années ont été marquées par des injonctions sociétales très rigides, lisses, presque monacales", veut croire Vincent Grégoire, du bureau de style Nelly Rodi. "La tendance était au folk doux, au rock minimaliste, au zen et à l'intériorité avec le film Des hommes et des dieux, par exemple.
Or, la crise économique et les révoltes arabes sont passées par là. "On sent une volonté de désobéir, de provoquer, d'enfreindre les multiples interdictions de la société", ajoute-t-il.
Et là, plus possible de compter sur la "rock attitude" pour aller au clash, maintenant que même les ministres et les banquiers y vont de leur refrain "voyez comme je suis rock'n'roll".
Du punk de salon
Pour se démarquer de la masse, du mainstream, il faut aller encore plus loin : quoi de mieux qu'une crête et qu'un collier de chien pour transgresser tous les codes ? Icônes du genre : le mannequin Alice Dellal au crâne à moitié rasé, qui arbore tatouages, Perfecto et collants troués ou, plus punk-gothique, l'actrice Taylor Momsen, de la série "Gossip Girl", qui ne sort jamais sans rouge à lèvre noir et croix autour du cou...
L'objectif de ces néo-punks ? La révolution, oui, mais dans la garde-robe. Envoyer bouler tous les dress codes. Provoquer le trouble, jouer sur l'androgynie comme le mannequin Agyness Deyn, qui a ressorti bretelles et Doc Marten's. Se transformer en bourgeoise chic et destroy en même temps. Telle une Isabelle Adjani dans "Subway", oser la crête iroquoise, oui, mais en robe du soir.
Du punk de salon en somme, pas trop trash, bourgeois branché en manque de rébellion, bien loin de l'esprit "no future" du mouvement fondé par la papesse Vivienne Westwood.
Exit les punks à chiens
Chez les hommes, idem : la crête se porte avec des costards très ajustés, très "clean", dans la lignée de l'acteur américain Jared Letto ou du réalisateur canadien Xavier Nolan.
Peu osent le total look, tel Rico le Zombie, égérie mâle de Lady Gaga au corps entièrement tatoué. Le credo : attention à ne pas trop en faire, au risque de tomber dans la catégorie honnie des punks à chiens du métro....
Et les vrais punks, alors ? Ils existent, même s'ils n'en ont plus l'air. "La jeunesse d'aujourd'hui est en manque d'icônes qui vont à l'encontre du système", explique le sociologue Pascal Montfort.
De nouveaux rebelles
Comment incarner la rupture, alors que tous les repères générationnels sont brouillés ? "Aujourd'hui, les parents s'habillent comme leurs ados et inversement, les jeunes doivent donc personnifier leur révolte sur d'autres terrains que la mode", poursuit-il.
Leur monde à eux, c'est le Net, les réseaux sociaux. "Le vrai punk est adepte du no look gris-noir, il veut être invisible : c'est le hacker, le boycotteur d'Apple, l'apôtre de la gratuité du Net."
C'est Lisbeth Salander de la trilogie "Millenium" ou la tribu mystérieuse des Anonymous, les pirates vengeurs du journaliste Julian Assange. Leur mot d'ordre : la révolte, oui, mais consciente. "Nous, on ne prône pas le no future, on voudrait juste un futur", lance Grégoire, 16 ans, un révolutionnaire au look de Gavroche.
Pour Thomas Corlin, journaliste musical spécialisé, "le mouvement punk, c'est d'abord un état d'esprit, pas seulement un Perfecto noir. C'est oser refuser un CDI, vivoter de petits boulots, ne pas vouloir s'installer dans un système qui ne convient pas".
C'est aussi déclarer, comme Catherine Ringer, à 53 ans, "j'ai une ménopause passionnante", lancer, comme Brigitte Fontaine, en guise de voeu, "Monsieur le président, je vous gratte le c** très fort avec une fourchette" ou, telle Vivienne Westwood, refuser de réaliser la robe de mariée de Kate Middleton parce qu'elle ne la trouve "pas assez moderne". L'esprit punk, c'est toujours l'irrévérence au service de sa majesté.
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La Maison de luxe Robert Clergerie a annoncé, jeudi 7 juillet, avoir choisi le créateur français Roland Mouret comme nouveau directeur artistique.